MARTIN : Bonjour Laurent ! Ça y est, nous y sommes ! Quel plaisir que d’être à tes côtés cette après-midi pour échanger sur cette belle passion qui nous rassemble ! Ceci dit, je tenais avant de poursuivre et de débuter comme il se doit cet entretien, à te présenter tous mes remerciements pour ton acceptation et ta présence aujourd’hui ! Comment vas-tu ? Prêt à t’élancer ? Non pas pour un temps de classe cette fois-ci comme tu en as désormais l’habitude, mais plutôt pour un entretien qui s’annonce débordant de passion ! Par contre entre nous n’est-ce pas, si tu pouvais éviter de t’exprimer aussi vite que ce que tu pilotes, ça pourrait bien m’arranger ahahah !

Laurent : Salut Martin, on va essayer d’y aller doucement alors ahahah ! Et de ne pas être trop long car des anecdotes, j’en ai quelques-unes après dix-sept ans de rallye…

MARTIN : Ahah en effet, ça m’arrangerait, mais ne t’inquiètes pas, j’ai tout mon temps ! Aller c’est parti, on se lance ? ! 3…2…1… C’est parti ! Et top chrono avec la première question de cette interview qui restera très facile ! Si si je te le promets, nous allons commencer bien tranquillement… Mais pour le début ahah ! Peux-tu s’il te plaît nous dresser ton portrait, nous faire ta présentation, bien que je suppose que nombreux seront les lecteurs à te connaitre ahah ! Tout ceci afin que nous en sachions de ce fait, un peu plus sur la personnalité qui se cache derrière cette sympathique personne ! C’est à toi ahah !

Laurent : Et bien allons-y ! J’ai quarante-quatre ans, marié, deux enfants. Côté professionnel, je suis ingénieur en mécanique. J’ai commencé chez Renault par du développement sur moteur diesel. Puis j’ai eu l’opportunité de bosser chez PH SPORT pendant 2 saisons. A l’époque, PH SPORT cherchait un ingé pour suivre le programme Saxo Kit-Car avec un jeune pilote : un certain Sébastien LOEB. J’ai suivi le championnat de France sur Terre 2000 et le championnat du monde Super 1600 en 2001. On a aussi fait quelques épreuves avec BUGALSKI et PURASD, toujours sur des Saxo Kit-Car, comme le Monte Carlo, le San Remo ou l’Acropole, pour que les pilotes puissent préparer la saison suivante en Xsara WRC. De super souvenirs… Pour des raisons personnelles mais aussi professionnelles, je me suis ensuite tourné vers quelque chose de plus conventionnel, ce qui m’a permis de revenir en Isère mais aussi de construire la 205. Je bosse maintenant dans les engins de travaux public Caterpillar. Je suis responsable de la partie service après-vente sur une gamme de machine.

MARTIN : Excellent ! Superbe début et belle présentation ! Merci beaucoup ! Maintenant que nous apprenons à te connaitre davantage, tu vas donc pouvoir nous évoquer l’origine de cette passion que tu éprouves pour le sport automobile ! Même si je me doute bien que ce sentiment d’admiration pour cette discipline, est déjà bien ancrée en toi, et ce, depuis déjà de nombreuses années n’est-ce pas ? Et ce n’est pas fini ahah ! Ah oui j’ai oublié de te prévenir, plus on avance, plus ça se complique ahah ! Non plus sérieusement, je rajouterai même : Pourquoi cette passion pour le rallye ? En d’autres termes, qu’est-ce qui réellement, t’attires dans ce sport ? L’adrénaline peut-être, la vitesse, la diversité des tâches par exemples… Enfin je te laisse la parole, je n’en dis pas plus ahah !

Laurent : Cette passion du rallye m’est venue de mon père qui a été mécano en compétition et qui a également couru avec des copains. La première fois qu’il m’a emmené voir un rallye, c’était le Monte-Carlo 1986, dernière année des Groupe B avec les 205 T16, Lancia Delta S4, Audi Quattro, Metro 6R4, BX 4TC. C’est devenu ensuite une sortie annuelle qui continue toujours. Ensuite, se sont rajouté pas mal d’autres épreuves en spectateur. Ce qui me plait dans le rallye, c’est le fait qu’il y ait beaucoup d’improvisation et qu’on ne tourne pas en rond. On a également une proximité avec les voitures, les équipages, les assistances qu’on n’a pas dans les autres disciplines comme le circuit ou tout paraît plus artificiel. Et puis effectivement il y a le côté vitesse et sensations forcement quand on roule dans un environnement naturel. J’aime bien aussi le côté technique et mécanique. Suivre la technique des autos au plus haut niveau mais aussi construire, améliorer, faire évoluer son auto est intéressant.

MARTIN : Je suis personnellement de ton avis concernant l’improvisation en rallye, et le fait que ce ne soit jamais la même chose, une grande diversité au beau milieu de cette discipline ! Merci beaucoup Laurent ! Et des projets pour cette fin de saison ? Parce qu’eh oui, on arrive malheureusement et petit à petit au terme de celle-ci… Quoi de prévu pour la suite, ou aurons-nous le plaisir de vous encourager ? Enfin, même si je crois qu’une épreuve de taille vous tend peu à peu les bras ! Alors verdict ?

Laurent : Et oui c’est la fin de saison avec un gros morceau au programme puisque nous serons au départ de la Finale de la Coupe de France à Albi ! C’était un peu l’objectif au fur et à mesure que la saison avançait mais ça n’a pas été simple. Entre l’annulation du Saint-Marcellin et notre abandon au rallye de la Drôme, cela nous a fait deux rallyes à coefficient 4 ratés. Du coup il a fallu rouler un peu plus sur des régionaux où on a eu la chance de bien finir. Enfin, on y est arrivé. Ce sera ma cinquième finale après Epernay 2004, l’Ile Rousse 2005, Gap 2012 et Marseille 2017. Le premier objectif sera d’être à l’arrivée et bien sûr on essayera d’être le mieux classé possible mais il va y avoir de sérieux clients en F2000/14, de bons pilotes sur de bonnes autos. Rien que de participer c’est sympa et cela permet de rencontrer des équipages d’autres régions.

MARTIN : Ca y est c’est officiel ! Nous suivrons d’ailleurs tout ça de très près, et nous ne pouvons te souhaiter que le meilleur ! Il est vrai, que tous pilotes et copilotes ont un rêve… Mais pour toi, si je te le demandais… Et puis aller, soyons fou ! Je crois que tu te doutais que j’allais te poser la question ahah ! A quoi correspondrait-il ? Participer à une épreuve peut-être, rouler dans une auto bien spéciale, rencontrer une personnalité… Enfin, il reste pour autant très subjectif, et c’est pour ça que tu vas peut-être nous dévoiler tout cela !

Laurent : Ça serait de rouler dans une 306 Maxi ! Mais cela restera un rêve je crois. Si leur côte avait chuté il y a quelques années, les prix sont maintenant complètement fous ! Sinon faire une épreuve du championnat du monde pourrait sympa, Monte Carlo ou Corse, mais la 205 est trop vieille pour cela ahahah !

MARTIN : Eh bien je te le souhaite ! Et pourquoi pas même un tour de Corse en 306 Maxi ahah ? Si mes calculs sont bons… Ton compteur personnel en tant que pilote, s’élève à un total de… Ouhla ça commence à faire ! La barre de la centaine de départ à déjà été franchie ! Excellent ! Si je ne me trompe pas, tu en es à exactement cent-cinq rallyes ? Un beau palmarès qui ne cesse de s’enrichir, pour votre plus grand bonheur ! Je vais te laisser le soin de nous parler de ce parcours, depuis tes premiers tours de roues et ce jusqu’à aujourd’hui…

Laurent : Il t’en manque un peu ! A l’occasion de mes cent départs j’avais fait un peu de statistiques que j’ai remises à jour pour ton interview : cent-dix rallyes au total sur quatre voitures différentes : la 205 bien sûr loin devant les autres avec cent épreuves ; la Saxo N/2 : 5 épreuves ; la Mitsu Evo6 A/8 : quatre épreuves sur terre ; et enfin un rallye avec une AX sport A/5 qu’on m’avait prêtée. Au total quinze copilotes quand même ! Mais cinq qui ont été réguliers : Marie-Laure, Thomas, Amandine, Sylvain et Lili qui sera en photo sur le montage de l’interview ! Au niveau résultats, vingt-neuf victoires de classe dont dix-huit victoires de groupe, toutes en F2000 à l’exception d’une victoire de classe en A/5. Et pour finir quinze abandons malheureusement. J’ai commencé comme copilote en 1999. J’ai fait deux rallyes sur terre avec Alain ARGOUD sur une 106 XSI A/5 et trois rallyes asphalte avec Frédéric VIGNAT sur une Visa GTI F2000/12 mais sur les cinq épreuves on en a fini qu’une ! Après une petite pause, le temps de réunir du temps et finances, puis une année et demi à monter la 205, j’ai commencé au volant en 2002. La 205 était en groupe F, avec un moteur 16 soupapes. La première épreuve fut le rallye Porte de la Bièvre en ouvreur qui s’arrêta trop tôt après une casse de cardan à la fin de la première spéciale. Comme il ne restait plus grand-chose en fin de saison, la première vraie épreuve en tant que concurrent a été le rallye du Mistral 2002, à côté d’Aix-en-Provence que nous avons fini. En 2005, avec l’arrêt du groupe F, la 205 passe en F2000 et je fais le pari de monter un moteur 8 soupapes pour bénéficier de la légèreté de la 205. Et cela fonctionne pas mal. Depuis, j’en suis à la troisième et probablement dernière évolution de ce moteur. Le reste de la voiture a connu de légères améliorations au fil des ans. En 2013, j’ai monté une boite séquentielle qui a rendu le pilotage encore plus plaisant et efficace. En 2018, nouveau départ avec une Mitsu Lancer Evo6 sur terre. Il a fallu un peu tout réapprendre. On a fait quatre épreuves du championnat de France. Si ça reste une super expérience, la terre c’est très dur pour les autos ; et les équipages ! Les parcours ne sont pas assez roulants à mon goût et les épreuves sont assez loin de la région Rhône-Alpes. La Mitsu ayant trouvé un nouveau propriétaire, je suis reparti sur l’asphalte cette année avec la 205. Depuis plusieurs années, j’essaye de varier les épreuves car il y en a certaines que j’ai fait souvent, et je trouve que c’est moins intéressant quand on connait trop, on perd l’esprit du rallye !

MARTIN : Oh non, j’y étais presque ahah ! Mes excuses… Un gros palmarès, c’est surprenant ! En trois mots, comment décrirais-tu cette passion, ton vécu au beau milieu de cette discipline qu’est le rallye… Et attention je compte ahah ! Trois mots, et pas un de plus !

Laurent : Pas facile ton truc ! Je dirais passion, sensation et compétition !

MARTIN : Pas facile ? Comment ça ahah ? Et bien c’est parfait ! Quel est ce sentiment qui survient en toi dès lors que l’on entre dans le cœur du sujet, la course ? Et plus précisément avoir quitté le parc fermé ! Autrement dit, comment te sens-tu à l’approche d’une, ou de spéciales ?

Laurent : Je suis assez stressé avant la course et je me demande toujours si je vais y arriver aussi bien que la fois d’avant. C’est quand même un sport étrange où on ne s’entraine quasiment jamais. En général, ça va beaucoup mieux dès les premiers mètres dans la première spéciale. La concentration prend le dessus et je ne pense à rien d’autre qu’à assimiler les notes et aller le plus vite possible…

MARTIN : Si tu devais prendre exemple sur quelqu’un, ou prendre de l’inspiration, sur qui serait-ce ? A moins que, ce soit déjà quelque chose de fait, et dans ce cas, qui pour toi, pourrait représenter un tel – modèle – ?

Laurent : Question difficile, j’ai toujours supporté les pilotes français : AURIOL, DELECOUR, LOEB, OGIER mais je n’ai pas vraiment de modèle ou d’idole particulier. Pour les notes, ayant côtoyé LOEB à ses débuts, j’ai repris son système de note qui ne doit pas être mauvais ahahah ! C’est d’ailleurs pas mal pour regarder ses caméras embarquées car ça me parle bien. J’aimais bien également Colin MC RAE également qui était toujours à la limite, et même au-dessus, assez souvent.

MARTIN : De grands, que dis-je, de très grands pilotes ! Je suis une fois de plus, en accord total avec ton idée : Team OGIER alors ahah ! Nous vivons tous de plus ou moins beaux moments, et c’est ce qui fait de ce sport, une discipline à rebondissement, bien que toute aussi riche… En ce qui te concernes, quels seraient ces quelques moments, qu’ils soient bien évidemment positifs et négatifs, depuis tes premiers tours de roues dans ce sport ? Des moments qui peuvent bien entendu avoir lieu dès que vous vous situez sur un rallye, où de nombreux aléas pourraient avoir lieu, ou bien avant dès la préparation bien sûr, ou la aussi, différents événements pourrait éventuellement perturber, en bien ou en mal, le déroulé de votre programme !

Laurent : Déjà arriver à construire la 205 et courir était une première satisfaction. Ensuite, se qualifier pour une finale était également très sympa, même si la première à Epernay a été compliquée avec des coupures moteurs pratiquement toute l’épreuve. Remporter le groupe F2000 à Gap en 2012 a été une sacrée surprise même pour nous et un moment très sympa, même si ce n’est pas la Finale où il y a eu le plus gros plateau. Il y a plein de moments sympas quand tout marche bien et voir l’arrivée d’une épreuve avec une voiture intacte est déjà une victoire. Quand le résultat est bon, c’est la cerise sur le gâteau. Mais forcement, il y a des moments moins sympas. Dans ceux là on peut mettre une grosse sortie de route au rallye de Chartreuse 2006 avec une caisse HS, notre pénalité d’une minute au rallye de Chartreuse 2018 pour un pauvre interrupteur d’extincteur sur off, accessible à tout moment, alors que nous aurions dû finir deuxième au scratch et plus récemment notre abandon au rallye de la Drôme cette année alors que nous étions en tête du groupe après une grosse bagarre et à seulement à huit kilomètres de l’arrivée. Mais on va garder le positif avec finalement une belle saison 2019 : quatre victoires de classe dont 3trois de groupe et un podium scratch, et la finale à venir.

MARTIN : Aurais-tu une expression, un slogan personnel, quelque chose qui te tiens à cœur et que tu désirerais mettre en avant aujourd’hui, ou qui pourrait même te correspondre bien entendu ? Cette phrase pourrait également être celle que tu ne pourrais pas t’empêcher éventuellement, de citer dès lors que vous êtes sur une course, tel un cri de guerre ?

Laurent : – Never give up – ! Il faut beaucoup de persévérance dans cette discipline. Il faut en général acquérir un minimum d’expérience pour avoir les premiers résultats, apprendre à rouler, prendre des notes, écouter le copilote, etcetera… Ce n’est pas simple. Et puis quand tu montes ta voiture de A à Z, il faut aussi de la patience et de la persévérance car tout ne fonctionne pas du premier coup… Loin de là ! Parfois, il faut aussi prendre sur soi et trouver des solutions pour finir une épreuve. Par exemple, l’année dernière sur la terre, on casse une jante et on arrache un flexible de frein. Après avoir pensé abandonner, on a dû faire une spéciale et quarante bornes de liaison avec uniquement le frein à main avant de passer à l’assistance et réparer pour finir. Finalement, on a eu la satisfaction de voir l’arrivée. Cette année encore, on casse un disque de frein arrière sur la liaison : un truc improbable ! Un kilomètre avant le départ de la dernière spéciale des Vignes de Régnié, impossible de partir dans le chrono comme ça vu le bruit et les vibrations. En quelques minutes on arrive à démonter le disque avec les quelques outils à bord de la voiture, on cale les plaquettes et on a pu finir le rallye avec trois disques de frein. Si on perd le groupe à cause de la pénalité pour deux minutes de retard au départ de la spéciale, on sauve la victoire de classe. Voilà pourquoi il ne faut jamais abandonner : – Never give up ! –

MARTIN : Ne jamais abandonner, ça tu l’as dit ! Seule la persévérance, ou du moins majoritairement, permettra de réaliser ses rêves, et atteindre ses objectifs, et pour cela une seule détermination : Ne jamais abandonner ! Nous arrivons déjà vers la fin de l’interview… Eh oui… Déjà terminé ! Ces moments passent toujours rapidement ahah ! Je vais alors te laisser le soin de conclure de la meilleure des façons ce bel entretien, ce très bon moment de partage et de passion qui s’est ainsi déroulé en ta compagnie, avec le fameux : mot de la fin ! Tu sais, c’est comme quand tu arrives d’une épreuve et que le speaker te tend le micro pour terminer en beauté ahah ! Juste avant, je me permets de te remercier, et oui, une fois de plus une fois pour ta présence aujourd’hui ! En espérant te retrouver prochainement sur le bord des routes ! C’est un immense plaisir que d’avoir pu discuter avec toi sur cette si belle passion que tu aimes tant partager, et que tu vis actuellement ! Merci pour ta collaboration, cette belle participation et ces magnifiques réponses, c’était vraiment un superbe moment ! Aller, c’est à vous… 3…2…1… et… Top chrono !

Laurent : Merci Martin pour l’interview mais également pour les photos passées et à venir. Pour finir, je vais remercier les quelques sponsors qui nous suivent, les copains qui nous donnent un coup de main tout au long de l’année pour l’assistance et autre quand il y a besoin, ainsi que ma famille pour le soutien !